Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 13.djvu/9

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de tout, dont [après] eux jouit avec éclat la troisième génération aujourd’hui dans toute son étendue, et qui a mis les plus obscurs par eux-mêmes et les plus ténébreux, mais de leur nom, en splendeur inhérente. C’est savoir tirer plus que très grand parti : la femme de sa beauté ; le mari de sa politique et de son infamie ; les enfants de tous les moyens mis en main par de tels parents, mais toujours comme les fils de la belle.

Une autre tira beaucoup aussi toute sa vie de la même conduite, mais ni la beauté, ni l’art, ni la position de cette belle, ni de son camard et bouffon de mari, ne permit à celle-ci ni la durée, ni la continuité, ni rien de l’éclat où l’autre parvint et se maintint, et qu’elle fit passer à ses enfants, petits-enfants, et en gros à tout leur nom. Celle-ci n’avoit qu’à vouloir. Quoique le commerce fût fini depuis très longtemps, et que les ménagements extérieurs fussent extrêmes, on connoissoit son pouvoir à la cour, tout y étoit en respect devant elle. Ministres, princes du sang, rien ne résistoit à ses volontés. Ses billets alloient droit au roi, et les réponses toujours à l’instant du roi à elle, sans que personne s’en aperçût. Si très rarement, par cette commodité unique d’écriture, elle avoit à parler au roi, ce qu’elle évitoit autant que cela étoit possible, elle étoit admise à l’instant qu’elle le vouloit. C’étoit toujours à des heures publiques, mais dans le petit cabinet du roi, qui étoit et est encore celui du conseil, tous deux assis au fond, mais les portes des deux côtés absolument ouvertes, affectation qui ne se pratiquoit jamais que lorsqu’elle étoit avec le roi, et la pièce publique contiguë à ce cabinet pleine de tous les courtisans. Si quelquefois elle ne vouloit dire qu’un mot, c’étoit debout à la porte, en dehors du même cabinet, et devant tout le monde qui, aux manières du roi de l’aborder, de l’écouter, de la quitter, n’avoit pas peine à remarquer jusque dans les derniers temps de sa vie, qui finit plusieurs années avant celle du roi, qu’elle ne lui étoit pas indifférente. Elle fut belle jusqu’