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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/108

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sans vue de fortune étoient pour la Constitution détestèrent cette entreprise.

M. de Fréjus commença, à la même fête, tout petit garçon qu’il étoit encore, à montrer les cornes au cardinal de Noailles, et à vérifier la prophétie que le feu roi lui avoit faite, lorsqu’à force de reins il lui arracha l’évêché de Fréjus pour l’abbé Fleury : qu’il se repentiroit de l’avoir fait évêque. Le roi l’entendoit de ses mœurs et de sa conduite ; et véritablement alors, qui auroit pu l’entendre autrement ? M. de Fréjus dit pontificalement la grand’messe devant le roi sans en demander permission ni en faire la moindre civilité, suivant le droit et la coutume jusque-là non interrompue, au cardinal de Noailles, qui le sentit et le méprisa. L’après-dînée, à vêpres, la duchesse de La Ferté quêta à l’issue du sermon de son beau-frère. Ce fut une autre nouveauté de voir quêter une vieille femme ; mais elle voulut par là courtiser la sœur, et le triomphe du cardinal de Rohan sur toutes règles de discipline. Cette même messe fit une autre querelle. L’abbé de Breteuil, mort depuis évêque de Rennes, y parut sur un tabouret, en rochet et camail noir, joignant le prie-Dieu du roi à gauche en avant, comme maître de la chapelle, [charge] qu’il avoit achetée du cardinal de Polignac. Les aumôniers du roi, qui sont là debout en rochet avec le manteau noir par-dessus, se plaignirent de cette comparution de l’abbé de Breteuil, et traitèrent son tabouret et son camail d’entreprise, parce qu’il n’étoit pas évêque. Les plaintes en furent portées à M. le duc d’Orléans qui, perquisition faite, condamna l’abbé de Breteuil. Le cardinal de Rohan ne laissa pas de se trouver embarrassé de soutenir pendant tout l’Avent son entreprise, quoiqu’il en eût eu l’avantage. Il crut qu’après l’avoir remportée, le plus sage étoit le parti de la modération, mais sans y paroître à découvert. Huit jours après la Toussaint, le P. de La Ferté alla dire à M. le duc d’Orléans qu’il le supplioit de le dispenser de prêcher l’Avent devant le roi,