Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/253

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prolongation des différends, qui certainement ne seroient point terminés que la promotion n’eût précédé. Il observoit que le pape étoit bien mal conseillé de faire un si grand tort à la religion, dont la défense à tous égards sembloit réservée au roi d’Espagne, ayant lieu de s’assurer qu’en usant généreusement envers la reine, elle y sauroit répondre avec usure. La reine accoucha d’un cinquième prince, qui mourut bientôt après.

Albéroni crut que l’Espagne devoit se fortifier du côté de la France ; il fit travailler à Pampelune. Il compta y avoir tout achevé dans le courant de l’année et y mettre cent cinquante pièces de canon. Il travailloit en même temps aux ports de Cadix et de Ferrol, en Galice, dont les ouvriers étoient exactement payés. Il comptoit avoir en mer vingt-quatre vaisseaux vers le 15 mai. On en construisoit un en Catalogne de quatre-vingts pièces de canon, qui devoit être prêt à la fin d’avril ; enfin les puissances étrangères commençoient à chercher avec empressement l’Espagne. Il y en avoit qui s’inquiétoient des bruits répandus depuis quelque temps de négociations commencées entre l’empereur et le roi d’Espagne. Albéroni avoit averti les ministres d’Espagne au dehors, de n’avoir aucune inquiétude de tout ce qui s’en pourroit débiter. Le roi de Sicile, toujours mal avec l’empereur, craignoit d’en être exclu. Le moyen sûr d’y être compris, s’il s’en faisoit un, étoit de l’être dans tous les traités que feroit le roi d’Espagne. Il donna donc ordre à son ambassadeur à Madrid de le faire comprendre dans le traité dont il s’agissoit entre l’Espagne et les États généraux. Cet ambassadeur en parla à Albéroni, et n’en reçut que des réponses courtes et vagues. Il vouloit engager les États généraux à traiter avec l’Espagne ; il prenoit toutes ses mesures pour en avoir l’honneur, et que ce fût à Madrid. Il se louoit et se faisoit louer sans cesse avec tout l’artifice imaginable, de la sagesse et du secret de son gouvernement, du bon ordre qu’il avoit mis dans les affaires de la monarchie, et de