Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/289

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et vingt mille livres de pot-de-vin. Je ne marque cette bagatelle que parce que le même Maupeou est devenu premier président [1], et a fait passer à son fils sa charge de président à mortier, tous deux avec réputation. Peu de jours après, Nicolaï, premier président de la chambre des comptes, obtint la survivance de cette charge pour son fils. Ce fut comme bien d’autres une grâce perdue pour M. le duc d’Orléans, qui ne trouva pas ce magistrat par la suite moins singulièrement audacieux à son égard. Ce prince fit plus utilement par la défense sévère qui fut publiée de la bassette et du pharaon sans distinction de personne. Ce débordement de ces sortes de jeux quoique défendus étoit devenu à un point, que les maréchaux de France avoient établi à leur tribunal qu’on ne seroit point obligé à payer les dettes qu’on feroit à ces sortes de jeux.

La duchesse de Duras mourut à Paris à cinquante-huit ans d’une longue maladie ; elle étoit veuve dès 1697 du duc de Duras, fils et frère aîné des deux maréchaux de Duras. Il n’avoit que vingt-sept ans, et ne lui avoit laissé que deux filles, dont elle avoit marié l’aînée, comme on l’a vu en son temps, au prince de Lambesc, petit-fils de M. le Grand, et avoit, comme on le verra, arrêté le mariage de l’autre lorsqu’elle mourut. Son nom étoit Eschallard ; elle étoit fille de La Boulaye, qui fit un moment tant de bruit à Paris dans le parti de M. le Prince, et qui est si connu dans les histoires et les mémoires de la minorité de Louis XIV. La Boulaye avoit épousé une fille unique du baron de Saveuse, et il fut tué maréchal de camp au malheureux combat du maréchal de Créqui à Consarbruck, en 1675. Son père avoit épousé

  1. René-Charles de Maupeou fut reçu président à mortier le 23 mars 1718, devint premier président en 1743, et, longtemps après la mort de Saint-Simon, garde des sceaux et vice-chancelier de France en 1763, enfin chancelier en 1768 (15 septembre). Il céda presque immédiatement cette charge à son fils, René-Nicolas-Charles-Augustin de Maupeou, qui s’est rendu célèbre par sa lutte contre les parlements.