Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/219

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de sa lettre aux évêques pour prévenir les conséquences que les malintentionnés pourroient tirer de la recherche de l’acceptation des évêques d’Espagne, comme si Rome croyoit qu’une acceptation de tous les évêques de la chrétienté pût donner la force aux constitutions apostoliques qu’elles avoient par elles-mêmes ou que cette acceptation y fût le moins du monde nécessaire, supposition la plus mal fondée. L’énormité de cette chimère saute aux yeux et porte l’indignation avec elle. C’est à elle néanmoins que Rome sacrifie tout ; habile à écarter tout ce qui lui peut porter préjudice et à se parer de tout avantage qu’elle peut usurper.

Elle ne répliqua rien aux raisons du nonce, mais elle lui fit savoit qu’il y avoit quelques expressions dans la lettre de l’archevêque de Tolède au pape qui lui déplaisoient. Celle-ci surtout : Comme le nonce de Votre Sainteté nous a fait exposer depuis peu. La délicatesse de l’infaillibilité et de l’indépendance du consentement même de l’approbation de l’Église, assemblée ou séparée, étoit blessée de ce qu’on pouvoit inférer de ces termes que l’archevêque eût été sollicité d’accepter la constitution. Le fond de la lettre plut tellement au pape qu’il promit, si l’archevêque lui écrivit une autre lettre pareille où ces mots fussent omis, non seulement de lui répondre, mais de lui donner toutes les louanges qui lui convenoient. Ainsi se débite l’orviétan de Rome pour en masquer la tyrannie. Le pape suspendit donc sa réponse, parce qu’il s’assuroit que l’archevêque de Tolède la mériteroit incessamment par une prompte obéissance. Je ne puis mieux placer qu’en cet endroit l’anecdote que j’ai promise, où elle se trouvera plus à propos et plus naturellement que si je la différois au temps de mon ambassade en Espagne, quatre ans après ceci.

Diegue d’Astorga y Cespedez, gentilhomme espagnol, né en 1666, est le prélat duquel il vient d’être parlé. D’inquisiteur de Murcie il fut fait évêque de Barcelone, à la mort de ce furieux cardinal Sala, en 1715, dont j’ai parlé en son