Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/72

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sentiments, et bien plus encore Bernsdorff et Bothmar, ministres hanovriens du roi d’Angleterre.

Beretti, peu rassuré par les protestations de Chateauneuf que la France ne concourroit jamais à l’alliance des États généraux avec l’empereur, s’alarmoit d’avoir ouï dire que cet ambassadeur et l’abbé Dubois seroient chargés de traiter l’accommodement en Hollande entre l’empereur et l’Espagne. Il croyoit cette négociation très prochaine sur ce que Widword, envoyé d’Angleterre à la Haye, lui avoit dit que Sunderland lui mandoit que Stairs avoit communiqué un plan du traité au régent, que ce prince l’avoit approuvé, et qu’il étoit prêt à contribuer efficacement au succès de ce projet. Ainsi Beretti pressoit infiniment pour qu’on lui envoyât de Madrid des instructions de la manière dont il auroit à se conduire si cette négociation s’ouvroit à la Haye. Il craignoit, ou en faisoit le semblant, que le roi d’Espagne ne fût trahi de tous côtés, peut-être davantage que cette négociation ne sortît de ses mains pour passer en celles des ministres de France.

L’empereur avoit donné ses pouvoirs au marquis de Prié et au baron d’Heems, pour terminer ce qui restoit de différends avec les États généraux sur le traité de la Barrière, et pour traiter une alliance avec eux et avec l’Angleterre. Ces deux affaires paraissoient encore éloignées, surtout celle de l’alliance. Beretti en fit tant de plaintes et de bruit, que le Pensionnaire s’en plaignit à Widword. Son inquiétude étoit extrême de ne rien recevoir de Madrid. Enfin, pour forcer, Albéroni à s’expliquer, il lui manda qu’il étoit souvent pressé par Widword de lui rendre enfin réponse des intentions de l’Espagne sur la négociation de paix qu’il s’agissoit d’entamer avec l’empereur, et s’étendoit sur sa réponse en termes généraux et en de grands raisonnements qu’il avoit faits à ce ministre, dont il se vantoit d’avoir la confiance et de ceux de Londres aussi, même de quelques-uns qu’il ne connoissoit pas, pour se faire croire le plus propre à conduire