Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 16.djvu/323

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ans ; et en verrai-je quatre ans durant la perspective tranquillement ? Mettez-vous en ma place : troubles pour troubles, il y en aura moins à présent qu’en différant, parce qu’ils croîtront toujours en considération et en cabales, et peut-être, comme je le crois, n’y en aura-t-il point du tout à cette heure. Eh bien ! que, pensez-vous de tout ceci, et à quoi vous arrêtez-vous ? » Je voulus lui donner le temps de la réflexion par une parenthèse, et à moi qui le voyois hors d’espérance de démordre. Je voulus aussi le sonder sur ce qui nous regardoit. Je lui dis que je pensois qu’il avoit fait une grande faute lors de son affaire avec les bâtards, de n’avoir point voulu nous mettre à la suite des princes du sang ; que quelque différence qu’il y eût d’eux à nous, un tel accompagnement eût bien embarrassé le régent, et l’eût forcé à remettre les bâtards en leur rang de pairie ; que par cela seul ils étoient perdus, et qu’alors la disposition publique du monde, et celle du parlement en particulier, étoit d’y applaudir ; mais qu’il avoit pris une fausse idée, que nous savions bien, et que nous n’ignorions pas qui nous avoit perdus, qui est de mettre un rang intermédiaire entre les princes du sang et nous ; que cette faute étoit grossière, en ce que jamais nous ne pouvions nous égaler aux princes du sang, au lieu que tout rang intermédiaire se parangonnoit à eux [1], comme ils l’avoient vu arriver par degrés, presque en tout, de MM. de Vendôme, et en tout sans exception, des bâtards et batardeaux du feu roi, même depuis leur habilité à la couronne retranchée. Il en convint très franchement, et il ajouta qu’il étoit prêt de réparer cette faute ; que son amitié pour le comte de Toulouse duquel je lui parlois tout à l’heure, en avoit été un peu cause, mais qu’il consentiroit à présent à leur réduction entière à leur rang de pairie. Il me dit, de plus, qu’il ne me feroit point de finesse, qu’il en avoit parlé au régent sans s’en soucier, mais comme d’une

  1. Se comparait à eux.