Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/31

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et résolurent une députation aux femmes des exilés pour leur témoigner la part que la compagnie prenoit en leur détention, et une autre la plus nombreuse qu’il se pourroit au roi et au régent, pour s’en plaindre. Ils furent donc dès le dimanche matin au Palais-Royal, et l’après-dînée aux Tuileries. Leur harangue, prononcée par le premier président, fut pressante, mais en termes très mesurés et très respectueux. La réponse à toutes les deux fut à peu près de même, grave et vague. Le lundi et le mardi le palais fut fermé, et un avocat, ayant plaidé à la cour des aides, pensa, être chassé de sa compagnie, qui avoit résolu de cesser ses fonctions ; cependant cette grande résolution, qui alloit à suspendre tout cours de justice, qui tendoit à soulever le monde et à essayer un second tome du fameux Broussel, de la dernière minorité, ne put se soutenir. Dès le mercredi le parlement reprit de lui-même ses ordinaires fonctions ; mais il ordonna aux gens du roi de se trouver tous les matins au Palais-Royal, pour insister sur le rappel de leurs membres. Ce manége, aussi ridicule qu’infructueux, dura jusqu’au 7 septembre. Comme les extrémités sont du goût des François, il se débita que, la cessation de l’exercice de la justice n’ayant pas réussi, le parlement entreprendroit de ne se point séparer aux vacances, et de continuer à s’assembler après la Notre-Dame de septembre. Néanmoins il n’osa l’attenter. Il laissa seulement commission au président qui devoit tenir la chambre des vacations d’aller souvent solliciter auprès du régent le retour de leurs membres. Ce président vit bien, par l’éloignement des lieux, où on sut enfin qu’ils étoient arrivés et détenus sans parler à personne, qu’ils n’étoient pas pour en sortir sitôt, vit le régent deux ou trois fois, et lui épargna ensuite une importunité inutile.

Ainsi finit cette grande affaire, et si importante que le repos de l’État en dépendoit, par le consolidement de l’autorité royale entre les mains du régent, en empêchant un partage