Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/390

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pure, que ni vous ni moi ne pouvions pas nous dissimuler que faisant ce conseil et ne m’en mettant pas, c’étoit pour moi un dégoût public, une diminution très grande, très marquée, très publique de ma situation auprès de vous, parce que peu de gens sauroient que je n’en avois pas voulu être ; et qu’entre ce peu-là, la plupart seroient persuadés que c’étoit un discours, et qu’en effet je n’avois pu y entrer. Mais, puisque votre défiance se tourne du côté que vous me la montrez, je vous répète que je veux être de ce conseil, que je vous le demande, et que, dès que je fais tant que d’insister auprès de vous pour y entrer, vous ne pouvez me le refuser. Reste donc à nommer les trois autres ; il y a longtemps que je vous presse de le composer, toutes vos réflexions sur le choix doivent être faites, nommez-les donc, et, au nom de Dieu, finissons ce qui devroit être fini et établi huit jours après que je vous en ai parlé la première fois. » Il demeura atterré et immobile, honteux je crois de m’avoir montré une défiance si injuste, pour ne dire pis, et si nettement repoussée ; plus embarrassé encore entre la salubrité de ce dont je le pressois, contre laquelle il sentoit qu’il n’avoit aucune sorte de raison à opposer, et l’intérêt radicalement contraire de l’abbé Dubois qui n’oublioit rien pour l’en empêcher, et qui le tenoit très et trop réellement dans ses fers. J’insistai encore d’autres fois pour cet établissement, et toujours depuis cette conversation pour en être, et toujours inutilement. À la fin je m’en lassai et abandonnai la barque aux courants. J’ai rapporté de suite ce qui se passa là-dessus à diverses reprises pour n’avoir point à revenir inutilement sur une chose qui n’a point eu d’exécution.

Mme la princesse de Conti fit le mariage de la fille unique de Mme de Feuquières, sa dame d’honneur, avec Boisfranc, du nom de son père, frère de la défunte femme du duc de Tresmes, qui se faisoit appeler Soyecourt, dont étoit sa mère, qui, mariée pour rien à ce vilain, hérita, comme on l’a vu ici en son temps, de tous les biens de sa maison par