Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 18.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

La Vrillière, leur dit de plus qu’il vouloit rétablir des rentes sur l’hôtel de ville à deux et demi pour cent. Les députés lui répondirent qu’il étoit de sa bonté et de sa justice de les mettre au moins à trois pour cent. M. le duc d’Orléans leur répondit qu’il voudroit non seulement les mettre à trois, mais à quatre et à cinq pour cent ; mais que les affaires ne permettoient pas qu’on put passer les deux et demi. Le lendemain 28 mai on publia l’arrêt qui remit les billets de la banque au même état ou ils étoient avant l’arrêt du 22 mai, qui fut ainsi révoqué au bout de six jours, après avoir fait un si étrange effet.

Le mercredi 29, La Houssaye et Fagon, conseillers d’État et intendants des finances, furent, avec Trudaine, prévôt des marchands, visiter la banque ; en même temps Le Blanc, secrétaire d’État, alla chez Law, à qui il dit que M. le duc d’Orléans le déchargeoit de l’emploi de contrôleur général des finances et le remercioit des soins qu’il s’y étoit donnés, et que, comme bien des gens ne l’aimoient pas dans Paris, il croyoit devoir mettre auprès de lui un officier de mérite et connu, pour empêcher qu’il ne lui arrivât quelque malheur. En même temps Beuzwaldt [1], major du régiment des gardes suisses, qui avoit été averti, arriva avec seize Suisses pour rester jour et nuit dans la maison de Law. Il ne s’attendoit à rien moins qu’à sa destitution ni à cette garde ; mais il parut fort tranquille sur l’une et sur l’autre, et ne sortit en rien de son sang-froid accoutumé. Ce fut le lendemain que le duc de La Force mena Law chez M. le duc d’Orléans par la porte ordinaire, qui ne voulut pas le voir, et qui le vit le lendemain, conduit par Sassenage, par les derrières ; depuis quoi il continua de travailler avec lui, sans s’en cacher, et à le traiter avec sa bonté ordinaire. J’ai rapporté plus haut cette comédie que donna le régent, mais d’avance et

  1. On écrit ordinairement ce nom Besenval ou Beseval, comme on l’a déjà fait observer.