Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 18.djvu/213

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dans le monde et dans sa famille, toujours très vertueuse et très peu de bien. Du côté de l’esprit, elle tenoit tout de son père.

La vicomtesse de Polignac, qui étoit sœur du feu comte du Roure. Son mari et son frère étoient chevaliers de l’ordre, et elle étoit mère du cardinal de Polignac : c’étoit une grande femme, qui avoit été belle et bien faite, sentant fort sa grande dame qu’elle étoit fort dans le grand monde dans son temps. Beaucoup d’esprit, encore plus d’intrigue, fort mêlée avec la comtesse de Soissons et Mme de Bouillon dans l’affaire de la Voysin, dont elle eut grand’peine à se tirer, et en fut exilée au Puy et en Languedoc, d’où elle ne revint qu’après la mort du roi. Elle avoit quatre-vingts ans.

Prior mourut en même temps à Londres, en disgrâce et en obscurité, après avoir échappé pis ; si connu pour avoir apporté à Paris les préliminaires de la paix d’Utrecht, longtemps chargé des affaires d’Angleterre à Paris, et dans l’intime secret des ministres qui gouvernoient sous la reine Anne, qui furent recherchés après sa mort avec tant de fureur, et que Prior, arrêté et menacé des supplices, trahit complètement pour se sauver ; il ne mena depuis qu’une vie misérable, obscure, méprisée de tous les partis. C’étoit un homme extrêmement capable, savant d’ailleurs, d’infiniment d’esprit, de bonne chère et de fort bonne compagnie.




CHAPITRE XI.


Raisons qui terminent les longs troubles du Nord. — Paix de Nystadt entre la Russie et la Suède. — Réflexions. — Mesures pour apprendre au roi son mariage et le déclarer. — Le régent, en cinquième seulement dans le cabinet du roi, lui apprend son mariage, et le déclare