Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 18.djvu/218

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et du public, à cause de l’âge de l’infante encore dans la première enfance. Le régent résolut enfin de prendre un jour de conseil de régence, et le moment avant de le tenir, pour apprendre au roi son mariage et le déclarer sans intervalle au conseil de régence, pour que tout de suite ce fût une affaire passée et consommée.

Il arriva par hasard que ce même conseil de régence, où la déclaration du mariage ne se pouvoit plus différer par rapport à l’Espagne, se trouvoit destiné à une proposition d’affaire de papier que j’avois fort combattue dans le cabinet de M. le duc d’Orléans, avec lequel j’étois enfin convenu que je m’abstiendrois ce jour-là du conseil, comme on a vu ici que cela arrivoit quelquefois. Mais les lettres d’Espagne, qui arrivèrent entre cette convention et la tenue du conseil, ayant obligé M. le duc d’Orléans à y déclarer le mariage, et l’affaire du papier ne se pouvant différer, il voulut que je me trouvasse au conseil. Je m’en défendis, mais il craignoit quelque mouvement de ceux du conseil qu’on appeloit de la vieille cour, qui étoit la cabale opposée à M. le duc d’Orléans, et ce fut cette raison qui l’empêcha de déclarer les deux mariages en même temps. Nous disputâmes donc tous deux sur la manière dont j’opinerois sur l’affaire du papier, et après avoir bien tourné et retourné, et cédé à la volonté absolue de M. le duc d’Orléans, qui voulut que j’y assistasse à cause de la déclaration du mariage du roi, je compris que, quoi que j’y pusse dire contre l’affaire du papier, elle n’en passeroit pas moins, et que, dans la nécessité où je me trouvois de ne m’absenter pas de ce conseil et d’y opiner, je pouvois, pour cette fois, m’abstenir de m’étendre et de disputer, et me contenter d’opiner contre brièvement. M. le duc d’Orléans s’en contenta, mais je le suppliai de se persuader que je me rendois à cette complaisance que pour cette seule fois, à cause de la déclaration du mariage du roi, où il exigeoit si absolument que je me trouvasse, dans ce conseil, et de continuer à trouver bon ou que je m’opposasse de toutes mes