Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 19.djvu/416

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et de le conduire, en la soutenant toujours, jusqu’au trône du jubé, où se fait l’intronisation. Il est impossible, par la forme de cette ancienne couronne, que cela ait pu se pratiquer autrement ; mais les relations approuvées et publiées ont affecté de brouiller cet endroit si essentiel de la cérémonie, ne parlant point exprès, pour exténuer tout, du soutien de la couronne de Charlemagne sur la tête du roi par les pairs, et laissent croire qu’il l’a portée immédiatement sur sa tête. Ce n’est pas la seule réticence affectée de cet important endroit de la cérémonie. Elles taisent la partie principale de l’intronisation, qui s’appelle l’esjouissance des pairs, et voici ce qui a été soigneusement omis par ces relations tronquées. Chaque pair, ayant baisé le roi à la joue assis sur son trône, fait de façon que de la nef il est vu à découvert depuis les reins jusqu’à la tête : le pair qui a baisé le roi se tourne à l’instant à côté du roi, le visage vers la nef, s’appuie et se penche sur l’appui du jubé, et crie au peuple : « Vive le roi Louis XV ! » À l’instant le peuple crie lui-même : « Vive le roi Louis XV ! » À l’instant une douzième partie des oiseaux tenus exprès en cage sont lâchés ; à l’instant une douzième partie de monnaie est jetée au peuple. Pendant ce bruit le premier pair se retire à sa place sur le jubé même ; le second va baiser le roi, se pencher au peuple et lui crier le « Vive le roi Louis XV ! » À l’instant autres cris redoublés du peuple, autre partie d’oiseaux lâchés, autre partie de monnaie jetée, et ainsi de suite jusqu’au dernier des douze pairs servants.

Les relations disent tout hors cette proclamation des pairs au peuple, et cette distribution d’oiseaux et de monnaie à chacune des douze proclamations. La raison de ce silence est évidente ; je me dispenserai de la qualifier. Je ne parle point des fanfares et des décharges qui accompagnent chaque proclamation, et dont le bruit, ainsi que celui de la voix de tout ce qui est dans la nef ne cesse point, mais redouble à chaque proclamation et ne commence qu’à la première. L’autre couronne