Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 20.djvu/26

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d’Orléans prit à sa place le lieutenant de police, second fils du feu garde des sceaux d’Argenson. J’oubliois de marquer que les postes avoient été données à Morville, secrétaire d’État des affaires étrangères, avec une grande et juste diminution d’appointements.

On apprit en ce même temps que Leurs Majestés Catholiques avoient mis le prince et la princesse des Asturies ensemble, et que leur mariage avoit été consommé.

Le duc de Bouillon, fort occupé d’étayer de plus en plus sa princerie par des alliances étrangères, dont les siens s’étoient si bien trouvés, avisa d’en éblouir, ainsi que de ses grands établissements, le prince Jacques Sobieski, fils aîné du célèbre roi de Pologne, qui vivoit retiré dans ses terres en Silésie ; répandit beaucoup d’argent autour de lui, et fit si bien que le mariage de sa seconde fille fut conclu avec le prince de Turenne, fils aîné du duc de Bouillon et de la fille du feu duc de La Trémoille, sa première femme.

Ce mariage flattoit extrêmement le duc de Bouillon. Le grand-père de sa future belle-fille avoit occupé longtemps le trône de Pologne, et en avoit illustré la couronne par ses grandes actions ; sa femme étoit sœur de l’impératrice, épouse de l’empereur Léopold, et mère des empereurs Joseph et Charles, et sœur aussi de la reine douairière d’Espagne, de la feue reine de Portugal, des électeurs de Mayence et Palatin, et de la duchesse de Parme, mère de la reine, seconde femme du roi d’Espagne. Enfin, la fille aînée du prince Jacques Sobieski avoit épousé le roi d’Angleterre, retiré à Rome. Le mariage fut célébré par procureur, à Neuss, en Silésie, et en personne à Strasbourg, un mois après. Mais le prince de Turenne tomba malade presque aussitôt, et mourut douze jours après son mariage. Personne de la famille n’étoit allé à Strasbourg que son frère ; la mariée y étoit arrivée en fort léger équipage. On comptoit l’amener tout de suite à Paris, quand la maladie