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MADAME DE POMPADOUR.

que réveille l’aimable artiste : l’Amour cultivant un myrte, l’Amour cultivant des lauriers. En général, les Amours se retrouvent sous toutes les formes, et le Génie militaire lui-même est représenté en Amour, méditant devant des drapeaux et des canons. Non contente de reproduire ainsi sur cuivre à l’eau-forte les gravures sur pierres fines de Gai, Mme de Pompadour paraît en avoir fait quelques-unes elle-même au touret sur pierres fines (agate ou cornaline). Ses eaux-fortes, d’ailleurs, ont été retouchées au burin. Enfin, ici comme pour l’imprimerie, elle a mis de toute manière sa main, sa jolie main, à l’œuvre ; elle est du métier, et, de même que les bibliophiles l’inscrivent sur leur liste et les typographes sur la leur, les graveurs ont droit de compter dans leurs rangs, à titre de confrère, Mme de Pompadour graveuse à l’eau forte.

La manufacture de Sèvres lui doit beaucoup ; elle la protégea activement ; elle y conduisait souvent le roi qui, cette fois, sentait l’importance d’un art auquel il devait de magnifiques services de table, dignes d’être offerts en cadeau aux souverains. Sous l’influence prochaine de Versailles, Sèvres eut bientôt des merveilles originales à opposer à celles du Vieux-Saxe et du Japon. Nulle part le genre dit Pompadour ne brille avec plus de délicatesse et de fantaisie, et plus à sa place, que dans les services de porcelaine de cette date. Cette gloire, due à un art fragile, est plus durable que bien d’autres.

Tandis que M. de Marigni, son frère, appelait de Lyon Souflot pour le charger de la construction de Sainte-Geneviève (Panthéon), elle s’intéressait vivement et contribuait pour sa part à l’établissement de l’École militaire. Parmi le très-petit nombre des lettres authentiques qu’on a d’elle, il s’en trouve deux qui donnent là-dessus