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Page:Sainte-Beuve - Le Clou d’or, 1881.djvu/91

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abonnés, de midi à une heure, rarement plus tard. Le domestique m’ouvre, et, sans parole, sans autre introduction qu’un coup de chapeau, j’entre dans le salon à petit bruit ; ma semelle fine (c’est une de mes délicatesses) froisse à peine l’épaisseur du tapis et n’annonce rien. Le sommeil de la petite-maîtresse peut se continuer dans la pièce voisine, la conversation à demi-mot ne cesse pas. Les mères restent à leur toilette, dès qu’elles ont vu ce que c’est qui entre ; les filles ne lèvent pas les yeux de dessus le cahier du piano. Parfois, au bruit de la porte que je ferme (car c’est le seul signe alarmant), j’entends dans le fond un brusque mouvement, comme quelque chose qui s’enfuit. Mais bientôt, au premier craquement de la clef dans le cadran, tout se rassure. Je ne suis que le temps qui, de l’autre côté, vient régler ses comptes ; cela ne les regarde pas.