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LETTRES

de vos attentions et bontés pour Compiègne : j’ai eu pour domestique le plus excellent sujet[1].

Je suis plein de réflexions : savez-vous que ce dernier choix fait à Paris est un des plus envenimés qu’on pût faire[2] ? Je n’en connais pas de pire. Cela prouve que les Français sont capables de toutes les badauderies et bêtises en fait de personnes : qu’est-ce donc s’il s’agit d’idées ! Les journaux leur font tout avaler. Il se fait en ce moment, au mot d’ordre de liberté, un grand

  1. On peut s’apercevoir dans les Nouveaux Lundis, tome VI, qu’il y a une interruption de travail de plus de vingt jours entre le dernier article sur Théophile Gautier et le premier sur Vaugelas. M. Sainte-Beuve avait passé ce temps-là à Compiègne. C’était la première fois qu’il y allait, et il n’y retourna plus.
  2. L’élection de M. Eugène Pelletan, annulée une première fois, puis confirmée de nouveau par le suffrage universel (13 et 14 décembre 1863). — En 1867, la discussion du Sénat sur les Bibliothèques populaires faisait de M. Sainte-Beuve le défenseur de M. Pelletan, qu’il appelait : « Mon ennemi peut-être. » Il reçut en réponse cette belle lettre : « Non, je ne suis pas votre ennemi ; pourquoi le serais-je ? J’ai été votre adversaire quelquefois, je l’avoue, avec une amertume qui a peut-être son excuse dans la tristesse des temps que nous venons de traverser. Mais vous avez vengé devant le Sénat la liberté de pensée avec trop de courage, ai-je besoin d’ajouter avec trop de talent, pour que ce ne soit pas un devoir à tout esprit libéral de vous en témoigner sa reconnaissance. »