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LES CONSOLATIONS.

Tout embaume alentour, et frémit, et reluit ;
Aux lambris, aux plafonds qu’un jour céleste éclaire,
Il reconnaît de l’Art l’immuable exemplaire ;
Il rentre, on le reçoit comme un frère exilé ;
— C’est ton lot, Michel-Ange, et Dieu t’a consolé !

Septembre 1829.


XVIII

À MON AMI ANTONY DESCHAMPS


Aux moments de langueur où l’âme évanouie
Ne peut rien d’elle-même et sommeille et s’ennuie,
Moi qui vais pour aller, seul, et par un ciel gris,
Jurant qu’il n’est soleil ni printemps à Paris,
Avec quelques pensers que la marche fait naître,
Quelques regards confus sur l’homme, sur notre être,
Sur ma rêveuse enfance et son réveil amer,
Je longe tristement mon boulevard d’Enfer ;
Et quand je suis bien las de fouiller dans mon âme,
D’y remuer du doigt tant de cendres sans flamme,
Tant d’argile sans or, tant de ronces sans fleurs,
J’ouvre un livre et je lis, les yeux mouillés de pleurs :
Et mon cœur, tout lisant, s’apaise et se console,
Tant d’un poëte aimé nous charme la parole !
Il en est que j’emporte et que je lis toujours,
Surtout leurs moindres vers et leurs chants les plus courts,