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PENSÉES D’AOÛT.

Elle qui n’eut du feu qui me dévore
Que tiède haleine et reflet adouci.

Elle qui n’eut pour moi que frais sourire,
Que grâce émue et que tendre enjouement,
Et qui jamais ne m’aura laissé lire
Un de ces noms qu’on se donne en s’aimant,

Que, si je meurs, à cette heure confuse,
Aux premiers pleurs de son deuil épanché,
Son cœur alors (oh ! sans qu’elle s’accuse)
Lui dit tout haut ce mot qu’elle a caché.


II

UNE ROMANCE ENCORE


Quoi ! se peut-il, ma Dame, vous aussi,
Vous le cœur simple et la bonté parfaite,
Vous si peu femme en vanité coquette
(On l’est toujours par un coin que voici),
Dès qu’en vos fers s’est pris le moins rebelle,
Vous lui serrez sa chaîne sans merci,
Et vous trouvez moyen d’être cruelle !

Qu’ai-je donc fait ? ai-je hier, dites-moi,
Dans vos regards, hélas ! prétendu lire
Ce que jamais ils ne voudraient me dire,
Ce que jamais ils n’ont pensé, je croi ?