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PENSÉES D’AOÛT.

Jeune, il a dénombré leurs sauvages trésors.
Il les voulait revoir, quand l’amour infidèle
Le délaissait en proie à sa flamme moins belle ;
Il s’y voulait guérir ! — L’eau, les monts et les cieux
Ont redoublé d’attrait. Le roc mystérieux
Qu’il m’indique en ses vers, et le creux qui s’enfonce,
Le voilà, plus présent quand c’est lui qui l’annonce.
Il y cherchait, blessé, comme un asile sûr.
Mon cœur, aux mêmes lieux trainons mon deuil obscur !

Ainsi, je vais en art, en amitié secrète,
Observant les sentiers. Ainsi, fais, Ô poëte,
Ainsi, fais de tes jours ! et quand l’homme bruyant,
Qu’on répute là-bas solide et patient,
Jusqu’à trois fois peut-être, en sa lourde carrière,
Change d’opinions et de vaine bannière,
Toi qui parais volage et souvent égaré,
Passe ta vie à suivre un vestige adoré !


À MES AMIS

M. ET MADAME OLIVIER[1]


Salut ! je crois encore ! Ainsi j’espérais dire
À ce lac immortel[2] que j’allais visiter ;
Il me semblait qu’au cœur que le spectacle inspire,
Ma défaillante foi renaîtrait pour chanter.

  1. Auteurs du recueil de poésies intitulé : les Deux Voix. Lausanne, 1835
  2. Le lac des Quatre-Cantons.