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NOTES ET SONNETS.

D’autres, près de mourir, dorent leurs fronts épars
D’un rouge glorieux dont tout ce deuil s’étonne.

Les sapins cependant, les mélèzes, les pins,
D’un vert sombre, et groupés par places aux gradins,
Regardent fixement ces défaillants ombrages,

Ces pâleurs, ces rougeurs, avant de se quitter…
Et semblent des vieillards, qui, sachant les orages
El voyant tout finir, sont tristes de rester.



II

DE BALLAIGUES À JOUGNE, AU RETOUR.


Le 2 juin.


J’ai revu ces grands bois dans leur feuille nouvelle,
J’ai monté le versant fraîchement tapissé.
À ces fronts rajeunis chaque vert nuancé
Peignait diversement la teinte universelle :

Près du fixe sapin à verdure éternelle
Le peuplier mouvant, le tremble balancé,
Et le frêne nerveux tout d’un jet élancé,
De feuille tendre encor comme la fraxinelle.

Le mélèze lui-même, au fond du groupe noir,
Avait changé de robe et de frange flottante ;
Autant qu’un clair cytise il annonçait l’espoir.