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NOTES ET SONNETS.


À M. LE COMTE MOLÉ

LE TOMBEAU DE DELILLE[1]


Sur ce brillant tombeau qui connut de beaux jours,
Où pleuvait l’immortelle, où riait la verdure,
Que l’admiration bercail de son murmure,
Qu’un long soleil de gloire embrassa dans son cours,

Le temps vient ; tout succède, et les neveux sont sourds.
Seule, une vieille sœur, qui ne sait pas l’injure,
Croit au poëte mort : pour offrande et parure
Plus de fleurs que le peu qu’elle apporte toujours !

Mais l’hiver… mais si pauvre,… hélas ! reviendra-t-elle ?
Tu l’as su : dès demain, sur le marbre fidèle,
(Bienfait tout embelli qu’enchante un noble égard !)

Elle trouve, en changeant la couronne fanée,
La bûche du foyer, le pain de la journée,
La goutte d’un vin pur, cher au cœur du vieillard !


  1. Le moment est venu, peut-être, d’indiquer ce que ce sonnet dit beaucoup trop obscurément, c’est qu’il fut adressé à l’illustre Président du 15 avril, pour le remercier d’un bienfait le plus délicatement accordé par lui, sur notre simple information, à la belle-sœur du célèbre poëte.