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DE JOSEPH DELORME


SONNET


Enfant, je m’étais dit et souvent répété :
« Jamais, jamais d’amour ; c’est assez de la gloire ;
« En des siècles sans nombre étendons ma mémoire,
« Et semons ici-bas pour l’immortalité. »

Plus tard, je me disais : « Amour et volupté,
« Allez, et gloire aussi ! que m’importe l’histoire ?
« Fantôme au laurier d’or, vierges au cou d’ivoire,
« Je vous fuis pour l’étude et pour l’obscurité. »

Ainsi, jeune orgueilleux, ainsi longtemps disais-je ;
Mais comme après l’hiver, en nos plaines, la neige
Sous le soleil de mars fond au premier beau jour,

Je te vis, blonde Hélène, et dans ce cœur farouche,
Aux rayons de tes yeux, au souffle de ta bouche,
Aux soupirs de ta voix, tout fondit en amour.


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En vain j’ai fui la plage oisive ;
En vain ma rame avec effort
Fatigue la vague plaintive ;
Toujours ma nacelle dérive,
Et je reviens toujours au bord.