Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t1, 1878.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 2 —

sur Port-Royal à l’Académie de Lausanne. Après quelque première méfiance de mes forces, je me décidai et n’eus ensuite qu’à m’en applaudir. Une bienveillance sérieuse m’y a pris au début et m’a soutenu jusqu’au terme. Je serais trop simple de sembler croire cette bienveillance tout à fait unanime, rien n’est unanime nulle part ; mais il serait ingrat à moi de ne pas la croire générale. Le livre que j’offre maintenant aux lecteurs, et qui est sorti de ces leçons, porte en plus d’un endroit la trace de son origine locale, et j’avoue que j’ai cherché en ce sens à y effacer. Cette destination particulière d’une histoire toute particulière elle-même me plait, et, ce semble, ne messied pas. Le beau lac, au cadre auguste, dont les rivages tant célébrés ont eu de tout temps de délicieuses retraites pour les gloires heureuses et des abris pour les infortunes, a offert un nid de plus à une doctrine étouffée, qu’il plaisait à un esprit libre d’y transplanter un moment, et dont l’exposition n’aurait jamais eu ailleurs tant de soleil et de lumière. Là, me disais-je, Rousseau jeune a passé ; plus tard, son souvenir ému y désignait, y nommait pour jamais des sites immortels. Là-bas, Voltaire a régné ; madame de Staël a brillé dans l’exil. Byron, dans sa barque agile, passait et repassait vers Chillon. Ici même, Gibbon accomplissait avec lenteur l’œuvre historique majestueuse, conçue par lui au Capitole. J’y viens avec mes ruines aussi :