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PORT-ROYAL.

Grotte des Conférences près de la Source de la mère Angélique et non loin des arbres plantés de la main de d’Andilly. C’est de là que nous partirons, c’est là que nous nous tiendrons, ou du moins que nous nous replierons toujours volontiers, en redisant avec le poète :

 O rives du Jourdain ! ô champs aimés des Cieux !
Sacrés monts, fertiles vallées ! …

La fondation du monastère de Port-Royal, situé à six lieues environ de Paris au couchant, proche Chevreuse, remonte à l’année 1204. Matthieu Ier de Montmorenci-Marli étant parti en 1202 pour la quatrième croisade prêchée deux ans auparavant par Foulques de Neuilly, Mathilde de Garlande son épouse, de concert avec Eudes de Sully, évêque de Paris, eut l’idée de cette fondation, à l’intention du salut et de l’heureux retour de son époux ; celui-ci avait désigné, en partant, une somme de quinze livres de rente à prendre sur ses revenus pour être appliquée à des œuvres pieuses. Le lieu, le pays où l’on bâtit le monastère et l’église, se trouve, dans les plus anciennes chartes, appelé en général du nom de Porrois.

On disait que cette église, ce monastère nouveau, étaient sis en Porrois. La première charte où l’on trouve d’abord et où l’on voit poindre le nom du Port-Royal (de Portu Regio) est de 1216, c’est-à-dire de douze ans après la fondation, et quand on cherchait déjà peut-être un sens illustre à un nom qui probablement venait de source plus vulgaire.

L’abbé Lebeuf (Histoire du Diocèse de Paris) rapporte ce mot de Porrois à celui de Porra ou Borra, lequel en basse latinité signifie un trou plein de broussailles où l’eau dort (Borra, cavus dumetis plenus ubi stagnat aqua) ; définition qui, si peu flatteuse qu’elle soit, répond assez