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LIVRE DEUXIÈME.

dans M. de Belley : il ne sera pas inutile de rattacher à M. de Saint-Cyran, comme une conséquence tout immédiate, la personne de son neveu, et de vérifier rapidement dans ce dernier la pensée et la manière de l’autre poussée à ses limites et dans ses aspérités mêmes.

Martin de Barcos, neveu de M. de Saint-Cyran par sa mère, et né également à Bayonne, avait, jeune, étudié à Louvain sous Jansénius, et on entrevoit dans les Lettres de celui-ci que, tout en faisant cas de son élève, il le jugeait un peu pénible et lent à se débrouiller. Une étude opiniâtre avait triomphé de cette difficulté première qui n’était pas de la stérilité ; la terre pourtant, même dans sa culture, garda ses ronces. Revenu de Louvain, il ne quitta plus son oncle jusqu’à l’heure de la captivité : il travailla sous lui, devint aussi savant que lui,[1] rédigea probablement sous sa direction le Petrus Aurelius ; en un mot, il fut initié à toute sa vie intérieure et à toutes ses pensées, comme il l’avait été à celles de Jansénius. M. de Saint-Cyran mort, l’abbaye fut demandée de mille côtés ; les adversaires redoutaient que ; le nom ne restât attaché à une personne du même esprit : M. de Chavigny l’emporta pour M. de Barcos. Lorsqu’il alla pour remercier la reine : « Eh ! qu’auroit dit M. d’Andilly, répondit-elle, si je l’avois donnée à un autre ? »

M. de Barcos fut tout aussitôt impliqué dans l’affaire du livre de la Fréquente Communion, pour la phrase, si l’on s’en souvient, qu’il avait ajoutée à la Préface, sur saint Pierre et saint Paul, les deux Chefs qui n’en font

  1. « Mon neveu de Barcos est aussi savant que moi, » répétait souvent M. de Saint-Cyran ; il ajoutait même quelquefois : « Mon neveu mériteroit un Évêché. » Éloge suprême selon les idées qu’on lui connaît sur l’Épiscopat. M. de Barcos cependant ne fut fait prêtre qu’en 1647, étant déjà abbé.