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PORT-ROYAL.

qu’un.[1] J’ai dit, au précédent chapitre, comment il ne donna pas dans l’idée d’Arnauld d’aller à Rome et d’entrer en lice bruyante. Cette phrase mal trouvée, qui accrocha le livre de la Fréquente Communion porta aussi le premier échec à l’autorité de M. de Barcos au sein de Port-Royal. Il en avait une grande à la mort de son oncle : M. Singlin ne consentit à rester confesseur et directeur que sur sa décision. Mais M. Arnauld et d’autres lui en voulurent un peu de l’incident dont il avait été cause, et des écrits aggravants qu’il composa pour éclaircir sa phrase et la justifier. Nicole, à son tour, en survenant, conçut de lui une idée peu souriante, comme d’un auxiliaire suranné dans la forme, assez fâcheux sur le dogme, et cette idée dans son esprit put rejaillir jusqu’à l’oncle. Bien que M. de Barcos rendît encore des services directs à Port-Royal, comme lorsqu’il contesta et ruina, au gré des Jansénistes, l’interprétation donnée par le docte Sirmond au manuscrit intitulé’’Prœdestinatus, d’où l’on voulait conclure à une hérésie des Prédestinatiens ; bien qu’il se retrouve utilement, à titre de collaborateur, dans plusieurs écrits polémiques, et qu’il ait réfuté avec avantage Abelly sur saint Vincent de Paul, pourtant il ne lui arriva guère, depuis la mort de son oncle, de produire aucun sentiment essentiel ni d’ouvrir aucun conseil de circonstance, sans qu’à l’instant la plupart de ses amis de Port-Royal y vissent à redire. Il ne se pliait pas à la nouvelle tactique de défense et rompait presque à tout coup les mesures. Cela devint sur

  1. On fut frappé de cette proposition à Rome, surtout en raison du dessein qu’on avait prêté au cardinal de Richelieu de songer à établir un Patriarcat en France. On paraissait craindre qu’à la faveur de cette doctrine, un Patriarche des Gaules, par exemple, ne se pût dire un jour successeur de saint Paul, comme à Rome on se disait successeur de saint Pierre. Le commissaire de l’Inquisition allégua du moins ce genre de raisons à M. Bourgeois.