MADAME DE LA FAYETTE. 253
Mlle de La Vergne, Laverna, comme il disait . Plus tard,
il lui présenta son ami le docte Huet, qui devint aussi pour
elle un conseiller littéraire. Segrais, qui, avec Mme de Sévigné,
suffit à faire connaître Mme de La Fayette, nous dit :
« Trois mois après que Mme de La Fayette eut commencé
« d’apprendre le latin, elle en savoit déjà plus que M. Ménage
et que le Père Rapin, ses maîtres. En la faisant expliquer,
ils eurent dispute ensemble touchant l'explication
« d’un passage, et ni l’un ni l’autre ne vouloit se rendre au
« sentiment de son compagnon ; Mme de La Fayette leur dit :
« Vous n’y entendez rien ni l’un ni l’autre. — En effet, elle
« leur dit la véritable explication de ce passage ; ils tombèrent
d’accord qu’elle avoit raison. C’étoit un poête qu’elle
« expliquoit, car elle n’aimoit pas la prose, et elle n’a pas lu
« Cicéron ; mais comme elle se plaisoit fort à la poésie, elle
« lisoit particulièrement Virgile et Horace ; et comme elle
« avoit l’esprit poétique et qu’elle savoit tout ce qui convenoit
à cet art, elle pénétroit sans peine le sens de ces auteurs.
» Un peu plus loin, il revient sur les mérites de
<ref>(l) Laverna en latin signifie la déesse des voleurs ; cela lui fit faire toutes sortes de plaisanteries galantes ; il put crier Au voleur ! au voleur ! comme Mascarille:
Omine felici nomen prœsaga dedere
Fata tibi. Fuitis pulcra Laverna piœest.
Tu veiieres omnes cunctis l’urmosa puellis,
Tu cunctis sensus surripis uiia viris.
Il adresse aussi des vers à Mme de Sévigné, à Mlle de Scudéry, à Mme Scarron ; mais c’est bien Mme de La Fayette qui reste décidément sa beauté en titre. La jolie édition elzévirienne de ses Poésies (1663) offre ce nom à chaque page : dizains, ballades, églogues, élégies, lui sont coup sur coup adressés. J’y cherche quelque chose qui ne soit pas trop fade, et je m’arrête à ce madrigal, qui peut-être ne me paraît un peu plus senti que parce qu’il est en italien : i
in van, Filli, tu chiedi
Se lunganiente durera l’ardore
Che’i tuo bel guardo mi destô nel core.
Chi lo potrebbe dure ?
lncerta, o Filli, è l’ora del morire.</ref>