Page:Sainte-Beuve - Volupté.djvu/375

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« A cet odorat ensuite, pour les trop subtils et voluptueux parfums des soirs de printemps au fond des bois, pour les fleurs reçues le matin et, tout le jour, respirées avec tant de complaisance !

« Aux lèvres, pour ce qu'elles ont prononcé de trop confus ou de trop avoué ; pour ce qu'elles n'ont pas répliqué en certains moments ou ce qu'elles n'ont pas révélé à certaines personnes ; pour ce qu'elles ont chanté dans la solitude de trop mélodieux et de trop plein de larmes ; pour leur murmure inarticulé, pour leur silence !

« Au cou au lieu de la poitrine, pour l'ardeur du désir, selon l'expression consacrée (propter ardorem libidinis) ; oui, pour la douleur des affections, des rivalités, pour le trop d'angoisse des humaines tendresses, pour les larmes qui suffoquent un gosier sans voix, pour tout ce qui fait battre un cœur ou ce qui le ronge !

« Aux mains aussi, pour avoir serré une main qui n'était pas saintement liées, pour avoir reçu des pleurs trop brûlants ; pour avoir peut-être commencé d'écrire, sans l'achever, quelque réponse non permise !

« Aux pieds pour n'avoir pas fui, pour avoir suffi aux longues promenades solitaires, pour ne s'être pas lassés assez tôt au milieu des entretiens qui sans cesse recommençaient ! ” Mais tenons-nous, mon ami, dans la majesté du moment.

Il y eut un endroit où je m'adressai en français aux assistants, pour les avertir de bien participer et coopérer en esprit à l'action sacramentale, pour leur rappeler que nous viendrions tous à notre tour à ce suprême passage, et que nous eussiuns à mériter d'y être avec autant de calme que celle que nous entourions. Puis je l'avertis elle-même qu'elle eût à bénir sa fille, ses gens, et à proférer les conseils et les adieux. Elle le fit, sur sa fille d'abord vers laquelle je soulevai sa