Page:Sallust - Traduction de Jean Baudoin, 1616.djvu/240

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actions particulieres, qu’à celles que vous ferez pour l’aduancement de la Republique.


LA HARANGVE DE PORTIVS LATRO, CONTRE L. SERG. CATILINA.. I nos prieres jointes aux voftres ( Meffieurs les luges, dont les mœurs font incorruptibles & fainctes) euffens peu flefchir vne fois les Dieux immortels ; il y a jà long temps que nous aurions vn Eftat fleuriffant ; des Citoyens foi- gneux des affaires du public, & portez d’vne grande affection, tant à la Vertu, qu’au bien de noftre Patrie. Ce nous feroit alors vn extrefme contentement de voir que toutes les raiſons de no- deuroies eftre. ftre diſcours ne pourroient mieux eftre employees qu’à la louange des plus grands, & des meilleurs Citoyens. Car la chofe que nous eftimons la plus digne de l’eſprit, tant par lo tefmoignage de nos Deuanciers, que parla commune opinion du Peuple, eft cefte maniere d’exercice qui peut publier les hautes louanges des excellents homes, & enflammer les cœurs de nos Citoyens à les imiter.

Il eft autresfois aduenu que le fage Caton, Galba, Scipion, les Gracches, Porcinna, Craffus, & Antoine, grands Orateurs & fort renommez, ont pris plaiſir à de femblables harangues en vn temps auquel la vertu eftoit fleuriflante ; & l’affection d’vn chafcun enuers les bons arts incroyable. Mais pour nous, c’eft mon opinion que noftre bon-heur feroit incomparable, fi pri- ucz fimplemét de la felicité qui regnoit au temps de nos Peres, nous n’eftions cheuz dãs des abyfies de flots qui agitent cruël- lemēt la Republique, & en la mifere du fiecle où nous ſommes. Que fi M. Caton & Scipion(qui viuoient en vn meſme temps) ont autresfois harangué, ils ont eu pour fubject de leur Dif cours l’immortelle memoire de cefte ville ; les claires lumieres de leur fiecle, les Loix & les Ordonnances de nos Anceftres, enfemble la gloire des armes, & fouuent auffi les louanges & les victoires. Nous n’en pouuons pas faire de mefme en vne fi mef- chante faifon, en laquelle toute la grace requife aux harangués nous eft oftee, & pareillement tout moyen d’vfer d’vn langage agreable, ou de gaigner la bien veuillance du peuple. Car s’il Digitized by Google