Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/492

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recevoir, sans risque, les secours qui lui viendraient. Il fit encore porter dans son camp les armes et les machines qu’il avait sur ses vaisseaux, manda au camp une partie des rameurs qui servaient sur les galères gauloises et rhodiennes, et les arma pour essayer s’il ne pourrait pas, à l’exemple de l’ennemi, entremêler sa cavalerie de fantassins armés à la légère ; enfin il tira de ses vaisseaux des archers de toute espèce, d’Iturie et de Syrie, dont il grossit son armée : car on disait qu’à trois jours de là Scipion devait arriver et joindre aux troupes de Labiénus et de Pétréius ses huit légions avec trois mille chevaux. En outre, par l’ordre de César, on dresse des ateliers pour forger des flèches et des traits, fondre des balles, fabriquer des pieux. Il envoie en Sicile pour avoir du fer, du plomb, des claies, et du bois propre à construire des béliers, toutes choses qui manquent en Afrique. Il remarqua aussi qu’il n’aurait pas de blé en Afrique si l’on n’en allait pas chercher au dehors, parce que tous les laboureurs ayant été, l’année précédente, enrôlés par l’ennemi, on n’avait pas fait la moisson. D’ailleurs Labiénus avait fait transporter dans un petit nombre de places fortes tout le blé qui s’était trouvé en Afrique, et avait ainsi épuisé le reste de la province. Les villes, à l’exception de quelques-unes où il avait mis garnison, avaient été saccagées et détruites, leurs habitants forcés de se réfugier dans les places fortes, et la campagne entièrement ravagée.

XXI. Réduit à cette extrémité, César avait obtenu de quelques particuliers, à force de prières et de caresses, un peu de blé qu’il ménageait avec soin, il était aussi très exact à visiter chaque jour ses travaux et faisait alternativement monter la tarde à ses cohortes, à cause de cette multitude d’ennemis. Labiénus fit transporter sur des chariots, à Hadrumète, ses blessés, qui étaient en très grand nombre. Cependant les vaisseaux de charge de César erraient à l’aventure, incertains du lieu où il était campé ; les chaloupes des ennemis les attaquaient l’un après l’autre, et elles en avaient pris ou brûlé plusieurs. César, en ayant été informé, fit croiser sa flotte autour des îles et des ports, pour la sûreté des convois.

XXII. Cependant M. Caton, qui commandait à Utique, ne cessait de solliciter et d’exciter, par ses discours, Cnéius, le fils de Pompée : « Ton père, lui disait-il, à ton âge, voyant la république opprimée par l’audace et la perversité de quelques citoyens, les gens de bien mis à mort ou exilés de Rome et de la patrie, animé par son grand courage et par son amour de la gloire, quoique simple particulier et encore adolescent, ayant rallié les débris de l’armée de son père, rendit à la liberté Rome et l’Italie qui gémissaient sous le joug, et reconquit, avec une célérité merveilleuse, la Sicile, l’Afrique, la Numidie, la Mauritanie. Par là il acquit cette célébrité qui l’a fait connaître au monde ; et tout jeune encore, et simple chevalier romain, il mérita les honneurs du