Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/652

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Paru un temple (85) et le sénat une assemblée de rois. » Enfin, quels généraux que les nôtres ! Voyez-les dans leur camp : Curius renvoie le médecin de Pyrrhus, qui voulait lui vendre la tête de ce prince[1] ; et Fabricius rejette l’offre, que lui fait le roi, d’une partie de ses états. Voyez-les dans la paix : Curius préfère ses vases d’argile à l’or des Samnites, et Fabricius, dans l’austérité de sa censure, condamne comme un luxe excessif les dix livres de vaisselle d’argent que possédait Rufinus, personnage consulaire.

Qui s’étonnera qu’avec ces mœurs, et avec le courage de ses soldats, le peuple romain ait été vainqueur, et que, dans les quatre années de la seule guerre de Tarente, il ait réduit sous sa domination la plus grande partie de l’Italie, les peuples les plus courageux, les villes les plus opulentes et les contrées les plus fertiles ? Quoi de plus incroyable que cette guerre, si l’on en compare le commencement et l’issue ? Vainqueur dans un premier combat, Pyrrhus, pendant que toute l’Italie tremble, dévaste la Campanie, les bords du Liris et Frégelles ; des hauteurs de Préneste, il contemple Rome à demi subjuguée, et, à la distance de vingt milles, il remplit de fumée et de poussière les yeux des citoyens épouvantés. Ensuite, deux fois chassé de son camp, blessé deux fois, repoussé par mer et par terre jusque dans la Grèce, sa patrie, il nous laisse la paix et le repos ; et telles sont les dépouilles de tant de nations opulentes, que Rome ne peut contenir les fruits de sa victoire. Jamais, en effet, jamais triomphe plus beau, plus magnifique, n’était entré dans ses murs. Jusqu’à ce jour, on n’avait vu que le bétail des Volsques, les troupeaux des Sabins, les chariots des Gaulois, les armes brisées des Samnites. Alors on remarquait comme captifs des Molosses[2], des Thessaliens, des Macédoniens, des guerriers du Bruttium[3], de l’Apulie, de la Lucanie ; et, comme ornement de cette pompe, l’or, la pourpre, des statues; des tableaux, et ce qui faisait les délices de Tarente. Mais rien ne fut plus agréable au peuple romain que la vue de ces monstres qu’il avait tant redoutés, des éléphants chargés de leurs tours, et qui, loin d’être étrangers au sentiment de la captivité, suivaient, la tête baissée, les chevaux victorieux.

XIX. — Guerre contre les Picentins. — (An de Rome 485.) — Toute l’Italie jouit bientôt de la paix ; car, après Tarente, qui eût osé la rompre ? Mais les Romains voulurent attaquer et poursuivre les alliés de leurs ennemis. Alors on dompta les Picentins, et on prit leur capitale, Asculum[4], sous le commandement de Sempronius, qui, ayant senti trembler le champ de bataille pendant l’action, apaisa la déesse Tellus par la promesse d’un temple.

XX. — Guerre contre les Sallentins. — (An de Rome 486). À la soumission des Picentins succéda celle des Sallentins[5] et de Brundusium, capitale du pays, fameuse par son port ; ce fut la conquête de Marcus Atilius. Dans cette guerre, la déesse des bergers, Palès, demanda un temple pour prix de la victoire.

  1. Voyez Cicéron De Officiis, lib. III, c. 22. Et Val. Max. l. IV. c. 3, § 5.
  2. Habitants d’une partie de l’Épire.
  3. Ce territoire répond à la Calabre ultérieure, et formait la partie la plus méridionale de l’Italie.
  4. Ville si considérable, que, selon Pline (liv. III, c. 13), on y trouva trois cent mille habitants.
  5. Établis sur la côte orientale de l’Italie, dans la Messapie, qui répond à la terre d’Otrante.