Page:Salluste - Traduction de Jean-Henri Dotteville, 1775, 4e édition.djvu/161

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[1] & du rang qu’il tenoit autrefois, il ſe précipite au travers du plus épais bataillon, &, combattant toujours, tombe percé de coups.

LXI. On vit encore mieux, après le combat, quelle avoit été l’audace & la fermeté des Soldats de ce redoutable Chef. Preſque tous couvroient de leurs corps le pof‍te qu’il leur avoit aſſigné. Ceux que la cohorte Prétorienne avoit enfoncés, en étoient éloignés de quelques pas ; mais leurs bleſſures étoient toutes pardevant. Pour Catilina, on le trouva loin des ſiens, au milieu d’un monceau de ſes ennemis. Il reſpiroit encore, & les approches de la mort n’avoient point ef‍facé de ſon viſage les

  1. Pourquoi les perſonnes de naiſſance ont-elles ordinairement des ſentiments plus nobles que la lie du peuple ? C’ef‍t en partie parce qu’elles ſavent qu’on a déja d’elles cette idée. Cette bonne réputation ef‍t un bien qu’elles ne veulent pas perdre, & elles le perdroient infailliblement par une baſſeſſe, parce qu’un grand nombre d’hommes a les yeux attachés ſur elles. Les belles actions d’un homme de néant, au contraire, ſe ſont, pour la plupart, en pure perte du côté de la réputation. Preſque perſonne ne le regarde ; il a le temps de ſe faire tuer, avant qu’on ſonge à parler de lui. Le moyen de rendre un homme courageux, ef‍t ſouvent de lui perſuader qu’on le regarde comme tel.