Page:Salluste - Traduction de Jean-Henri Dotteville, 1775, 4e édition.djvu/256

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Les Généraux partageoient avec peu de perſonnes ce qu’ils enlevoient à l’ennemi, ne laiſſant aux Plébéiens que les fatigues de la guerre & l’indigence. Tandis qu’une partie de ceux-ci étoient occupés à ſervir dans nos troupes, leurs peres & leurs enfants ſe voyoient chaſſés de leurs héritages par ceux des Nobles dont ils avoient le malheur d’être voiſins. Ainſi la puiſſance jointe à une avarice ſans borne, envahit & profana tout. Il n’y eut plus de barriere pour elles, juſqu’à ce qu’elles ſe fuſſent elles-mêmes jetées dans le précipice où elles entraînoient tout le reſ‍te. Si-tôt qu’il ſe fut trouvé quelques Nobles[1] qui préférerent la vraie & ſolide gloire à une domination injuſ‍te, la diſcorde, le trouble & la confuſion bouleverſerent toute la Ville[2].

  1. Ainſi la vertu même paroît quelquefois augmenter le déſordre. Lorſqu’un parti eſ‍t totalement opprimé, il regne une eſpece de calme plus dangereux, peut-être, que la tempête ; mais pluſieurs ſe laiſſent éblouir par la tranquillité apparente dont ils jouiſſent.
  2. Quaſi permixtio terræ : f‍irent de la Ville une eſpece de chaos où tout ſe trouva oppoſé & confondu.

    Frigida cum calidis pugnabant, humentia ſiccis. Ovid.