Page:Salluste - Traduction de Jean-Henri Dotteville, 1775, 4e édition.djvu/38

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mée & de l’envie.

IV. Lorſqu’enf‍in rendu à moi-même, j’eus réſolu, après bien des malheurs & des dangers, de paſſer le ref‍te de mes jours, éloigné des af‍fairs publiques, mon deſſein ne fut pas de perdre un loiſir précieux dans la pareſſe & l’oiſiveté, ni de m’occuper ſervilement[1] à la culture des terres, ou à la chaſſe, mais, reprenant le plan dont m’avoit détourné une ambition mal placée[2], j’entrepris de toucher celles des actions du

  1. ſervilibus of‍ficiis intentum. Salluf‍te appelle occupations ſerviles, toutes celles qui ne regardent que le corps, dont l’emploi doit être de ſervir ; corporis ſervitio utimur.
  2. Voici la cenſure du Journal des Savants. « Mal-placée n’ef‍t pas le mot propre. Ce n’ef‍t pas une ambition mal-placée, que de vouloir ſervir la République dans les emplois auxquels on ef‍t propre. Par ambitio mala, Salluf‍te veut ſeulement faire entendre qu’il s’étoit mal trouvé de ſon ambition ; ainſi il falloit rendre ces mots par une ambition fatale, ou une ambition malheureuſe ». Cette réf‍lexion ſur la recherche des honneurs ef‍t fort juf‍te. Sachons de Salluf‍te s’il conſent qu’on en faſſe l’application à ſon temps : Verùm ex his (artibus animi quibus ſumma claritudo paratur) Magif‍tratus & Imperia, pof‍tremò omnis cura Rerumpublicarum, minumè hâc tempef‍tate cupiunda mihi videntur. Ceci ne doit pas être regardé comme un mot dit en paſſant ; il en déduit les raiſons avec énergie dans tout le troiſieme chapitre de la Préface de Jugurtha. Cependant, ſous Jules Céſar même, il avoit recherché & obtenu la Quef‍ture & le Gouvernement de Numidie. Il avoue donc ici que ſon ambition avoit été mal placée. Mais a-t-il dû dire ou penſer qu’elle avoit été fatale ou malheureuſe ? Tout le monde ſavoit qu’il y avoit gagné d’immenſes richeſſes, & il en jouit tranquillement juſqu’a ſa mort.