Page:Salverte - Essais de traductions, Didot, 1838.djvu/47

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Lorsqu’avec l’âge mon âme se développa, je m’occupai peu d’exercer mon corps aux armes et à l’équitation ; mais j’appliquai mon esprit à la culture des lettres, fortifiant par le travail ce que la nature avait doué en moi de plus de vigueur. Livré à ce genre de vie, lisant et écoutant beaucoup, je me suis convaincu que les royaumes, les cités, les nations, ont vu constamment prospérer leur empire, tant que les véritables principes ont prévalu dans leurs conseils. Mais dès que ces principes ont été rendus impuissants par la faveur, la crainte, l’amour des voluptés, les peuples ont vu diminuer leurs forces ; la prépondérance politique leur a échappé ; ils sont enfin tombés dans la servitude.

Je suis également convaincu que, pour quiconque occupe dans sa patrie une place plus brillante et plus élevée que ses concitoyens, l’intérêt privé se lie intimement à l’intérêt public. Le salut de la cité n’assure aux autres que leur liberté personnelle. Il n’en est pas ainsi des hommes qui, par leur mérite, ont acquis des richesses, des dignités, de l’illustration. A peine se manifeste-t-il de l’agitation au sein de la république ébranlée, ils sont assiégés de soucis, accablés de travaux : il faut défendre ses biens, sa gloire, sa liberté ; il faut se porter partout, être partout le premier ; et plus, aux jours de la prospérité, la situation était florissante, plus, dans l’adversité, l’existence est inquiète et tourmentée.

Lors donc que le peuple, obéissant au sénat comme le corps à l’âme, n’agit que par ses impulsions, le