Page:Samain - Œuvres, t3, 1921.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
133
CONTES

neutre et effacé. Elle avait le front trop haut et bombé, les joues creuses, les pommettes arides, et son visage était sablé de taches de rousseur ; mais elle était la Douceur, et il sortait d’elle un charme inexprimable d’étiolée.

Dans sa robe noire, qui tombait à plis droits jusqu’à ses pieds, elle semblait comme incorporelle ; le bruit de ses pas était si léger qu’il paraissait encore augmenter le silence, et ses mains communiquaient à tout ce qu’elle touchait de secrètes vertus.

Ils se taisaient, n’échangeant, par instants, que de rares paroles. Parfois, Angisèle levait lentement ses paupières, et ses yeux apparaissaient bleus et pâles et comme tout pleins de la mer qu’ils contemplaient, et Rovère sentait ce regard descendre et mourir en lui à des profondeurs inconnues…

Tout à coup un étrange rire se fit entendre, et, soulevant brusquement la tapisserie, une enfant entra dans la chambre. Elle était vêtue d’une grande blouse de soie rose avec un collier