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ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN

investis d’une acuité extraordinaire ; et, dans une sorte de dédoublement halluciné, il lui semblait que c’était lui-même qu’il regardait étendu sur le lit mortuaire. Toute sa vie passée lui apparaissait, ramenée sous ses yeux dans un tragique panorama, et des souffles mystérieux venus comme de lointains corridors passaient sur la face de son âme.

Tout à coup un léger bruit se fit entendre et il se retourna. Angisèle venait de s’évanouir. Il se précipita sur elle et s’agenouilla pour la soutenir. Elle ouvrit lentement les yeux, mais, en apercevant la silhouette funèbre qui se détachait sur la muraille, elle fut prise d’un grand frisson et détourna la tête avec horreur ; puis, brusquement et comme cédant à quelque étrange et irrésistible sommation, elle étreignit Rovère et, plongeant ses yeux dans ses yeux, demeura immobile ; une pensée passa sur ses traits comme une flamme, son regard étincela, ses