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ÉDITION J. HETZEL



SPIRIDION

NOTICE


Spiridion a été écrit en grande partie et terminé dans la Chartreuse de Valdemosa, aux gémissements de la bise dans les cloîtres en ruines. Certes, ce lieu romantique eût mieux inspiré un plus grand poëte. Heureusement le plaisir d’écrire ne se mesure pas au mérite de l’œuvre, mais à l’émotion de l’artiste ; sans des préoccupations souvent douloureuses, j’aurais été bien satisfaite de cette cellule de moine dans un site sublime, où le hasard, ou plutôt la nécessite résultant de l’absence de tout autre asile, m’avait conduite et mise précisément dans le milieu qui convenait au sujet de ce livre commencé à Nohant.

GEORGE SAND.
Nohant, 23 août 1855.

À M. PIERRE LEROUX.

Ami et frère par les années, père et maître par la vertu et la science, agréez l’envoi d’un de mes contes, non comme un travail digne de vous être dédié, mais comme un témoignage d’amitié et de vénération.

George Sand.

Lorsque j’entrai comme novice au couvent des Bénédictins, j’étais à peine âgé de seize ans. Mon caractère doux et timide sembla inspirer d’abord la confiance et l’affection ; mais je ne tardai pas à voir la bienveillance des frères se changer en froideur ; et le père trésorier, qui seul me conserva un peu d’intérêt, me prit plusieurs fois à part pour me dire tout bas que, si je ne faisais attention à moi-même, je tomberais dans la disgrâce du Prieur.

Je le pressais en vain de s’expliquer ; il mettait un doigt sur ses lèvres, et, s’éloignant d’un air mystérieux, il ajoutait pour toute réponse :

« Vous savez bien, mon cher fils, ce que je veux dire. »