Page:Sand - Adriani.djvu/208

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vous faisaient sourire, et, quant à celles qui avaient son amour pour objet, vous me répondiez :

» — II n’a point de maîtresse ailleurs ; il a des principes religieux ; donc, il vous aime, et, si vous n’êtes pas heureuse, c’est que vous rêvez des sentiments romanesques que n’admet point la sainteté du mariage.

» Eh bien, vous êtes peut-être dans la réalité, vous avez peut-être l’appréciation juste de la fatalité qui préside aux destinées humaines ! Mais vous acceptez son arrêt sans effort, et, moi, je ne le peux pas ; non, tenez, ma mère, je ne le peux pas ! Je ne vous demandais plus qu’une chose : c’était de me laisser pleurer mon mari toute seule, là, dans un coin, de savourer ma douleur jusqu’à ce qu’elle fût épuisée. Vous ne l’avez pas voulu. Dès le lendemain d’une catastrophe effroyable, vous m’avez reproché d’être sourde aux compliments de condoléance de votre innombrable famille. Il fallait, au retour de la cérémonie funèbre, faire les honneurs d’un repas : votre famille avait faim ! Puis, tous les jours, des visites du matin jusqu’à la nuit ! Il fallait écouter ces odieuses questions de l’oisiveté curieuse ou de la pitié sans délicatesse, entendre vos parents se faire les uns aux autres le récit de l’événement, l’horrible description des blessures !… Vous pouviez affronter tout cela et dire à toutes choses : La volonté de Dieu soit faite ! » Moi, je fuyais, je m’enfermais, j’étouffais mes cris. Toi-