— C’est enlevé, mon petit ! lui dit gaiement quelqu’un du théâtre. Encore un acte comme ça et feu Nourrit est enfoncé !
— Ah ! tais-toi, malheureux ! s’écria Adriani, qui avait connu et aimé l’admirable et excellent Nourrit, et qui vit sa fin tragique et déchirante repasser devant ses yeux comme l’abîme de désespoir où s’engloutit parfois la vie des grands artistes.
Il trouva dans sa loge le baron de West, qui le serra dans ses bras en pleurant.
— Je comprends tout, s’écriait le digne homme. C’est à cause de moi, c’est pour moi que vous en êtes réduit là ! Je ne m’en consolerais jamais, si je n’étais sûr que c’est le dieu des arts qui l’a voulu, et que vous tourniez le dos à la gloire en vous enterrant à la campagne. Allons, vous chanterez mon opéra avant qu’il soit trois mois ! Où demeurez-vous, pour que j’aille vous exposer mon plan ?
— Parlez-moi d’elle ! s’écria Adriani. Où est-elle ? Que savez-vous d’elle ? L’avez-vous aperçue ? Savez-vous… ?
— Quoi ? qui, elle ? Ah ! oui… Mais non. Je ne sais rien, sinon qu’elle n’a rien fait d’excentrique à propos de votre départ. On l’a vue dans son jardin comme à l’ordinaire. Elle ne paraissait pas plus malade ni plus dérangée d’esprit qu’auparavant. Attendez ! oui, on m’a dit qu’elle partait, qu’on faisait des emballages chez elle.