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Page:Sand - Andre.djvu/178

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pour, moi, je ne m’en doute guère, et je ne vois pas où nous pourrons aborder.

— Allons tout droit, dit Geneviève.

— Tout droit ? la rive a cinq pieds de haut ; et si François s’engage dans les joncs qui sont par là, je ne sais où, nous sommes perdus tous les trois. Ces diables d’herbes nous prendront comme dans un filet, et vous aurez beau savoir tous leurs noms en latin, mademoiselle Geneviève, nous n’en serons pas moins pâture à écrevisses.

— Retournons en arrière, dit Geneviève.

— Cela ne vaudra pas mieux, dit Joseph. Que voulez-vous faire au milieu de ce brouillard ? Je vous vois comme en plein jour, et à deux pieds plus loin, votre serviteur ; il n y a plus moyen de savoir si c’est du sable ou de l’écume.

En parlant, Joseph se retourna vers Geneviève et vit distinctement sa jambe, qu’à son insu elle avait mise à découvert en relevant sa robe pour ne pas se mouiller. Cette petite jambe, admirablement modelée et toujours chaussée avec un si grand soin, vint se mettre en travers dans l’imagination de Joseph avec toutes ses perplexités, et, en la regardant, il oublia entièrement qu’il avait lui-même les jambes dans l’eau et qu’il était en grand danger de se noyer au premier mouvement que ferait son cheval.

— Allons donc, dit Geneviève, il faut prendre un parti ; il ne fait pas chaud ici.

— Il ne fait pas froid, dit Joseph.