Page:Sand - Andre.djvu/203

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aire aucun bien, et je puis lui apporter tous les maux. Ne voyez-vous pas que déjà ce malheureux amour lui a causé tant d’agitations et d’inquiétudes qu’il a failli en mourir ? ne voyez-vous pas que notre mariage est impossible ?

— Non, mordieu ! je ne vois pas cela. André a une fortune indépendante ; il sera bientôt en âge de la réclamer et de se débarrasser de l’autorité de son père.

— C’est un affreux parti, et qu’il ne prendra jamais, du moins d’après mon conseil.

— Mais je l’y déciderai, moi ! dit Joseph en levant les épaules.

— Ce sera en pure perte, répondit Geneviève avec fermeté. De telles résolutions deviennent quelquefois inévitables pour les âmes les plus honnêtes ; mais, pour qu’elles n’aient rien d’odieux, il faut que toutes les voies de douceur et d’accommodement soient épuisées, il faut avoir tenté tous les moyens de fléchir l’autorité paternelle, et André ne peut que désobéir en cachette à son père ou le braver de loin.

— C’est vrai ! dit Joseph, frappé du bon sens de Geneviève.

— Pour moi, ajouta-t-elle, je ne saurai ni descendre à implorer un homme comme le marquis de Morand, ni m’élever à la hardiesse de diviser le fils et le père. Si je n’avais pas de remords, j’aurais certainement des regrets, car André ne serait ni tranquille