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Page:Sand - Andre.djvu/72

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malade commença à se trouver mieux, le marquis accablé de fatigue et gardant sur ses traits l’empreinte des soucis de la journée, ne songea plus qu’à se reposer. Il rencontra André sous le péristyle de la maison, et lui dit avec la rudesse accoutumée de son affection :

« Pourquoi n’êtes-vous pas couché, gringalet ? est-ce qu’on a besoin de vous ici ? Allons vite, que tout le monde dorme ; je tombe de sommeil. »

C’était peut-être la meilleure occasion possible pour obtenir le cheval et le char à bancs ; mais André avait l’enfantillage de souffrir des mots grossiers ou communs que lui adressait souvent son père, et il prenait alors une sorte d’humeur qui le réduisait au silence. Il alla se coucher en proie aux plus vives agitations. Le lendemain devait être à ses yeux le jour le plus important de sa vie, et pourtant sans le cheval et le char à bancs tout était manqué, perdu sans retour. Il ne put dormir. Il fallait partir le lendemain avant le jour ; comment oserait-il aller trouver son père au milieu de son sommeil, affronter ce réveil en sursaut, si fâcheux chez les hommes replets, s’exposer peut-être à un refus ? Cette dernière pensée fit frémir André. « Ah ! plutôt mourir victime de sa colère, s’écria-t-il, que de manquer à ma parole et perdre le bonheur de passer un jour auprès de Geneviève ! »

Dès que trois heures sonnèrent il se rhabilla, et, prenant sa désobéissance furtive pour un acte de