Page:Sand - Andre.djvu/91

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devant elle. Il fut donc surpris à son tour, et chercha dans les grands yeux de Geneviève la cause de cet étonnement naïf.

— Est-ce que tu ne sais pas, dit Justine, qui n’était pas fâchée de déployer son petit savoir, que toutes ces lumières, comme tu les appelles, sont autant de soleils et de mondes ?

— Oh ! j’ai entendu parler de cela à Paris par une de mes compagnes qui avait un livre… mais je prenais tout cela pour des rêves… et je ne peux pas croire encore… Dites-nous donc ce que vous en pensez, monsieur André.

Cette interpellation fit sur André un effet singulier. Il venait d’être presque choqué de l’ignorance de Geneviève ; il se sentit tout à coup comme attendri. Jusque-là son amour avait été dans sa tête ; il lui sembla qu’il descendait dans son cœur. Il regarda Geneviève à la faible clarté du ciel étoilé : il distinguait à peine ses traits ; mais une blancheur incomparable faisait ressortir sa figure ovale sous ses cheveux noirs, et une sérénité angélique semblait résider sur ce visage délicat et pâle. André fut si ému qu’il resta quelques instants sans pouvoir répondre. Enfin il lui dit d’une voix altérée : « Oui, je crois que notre monde n’est qu’un lieu de passage et d’épreuve, et qu’il y a parmi tous ceux que vous voyez au ciel quelque monde meilleur où les âmes qui s’entendent peuvent se réunir et s’appartenir mutuellement. »

Geneviève s’arrêta encore et le regarda à son tour