Page:Sand - Antonia.djvu/344

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lui proposer celui que j’avais en vue pour elle, car je me suis dit : « Si moi, vieux bonhomme, je suis proposable à cause de mes écus, mon neveu, qui est jeune et qui aura bonne part de mes écus, peut bien être accepté. » C’est ce qui fait, mesdames et messieurs, qu’aujourd’hui, avec le consentement de madame d’Estrelle, je termine les débats d’affaires que nous avions ensemble par un mariage entre elle et mon neveu Julien Thierry, lequel je me fais l’honneur de vous présenter.

— Ah bah ! le jeune peintre ? s’écria madame d’Ancourt, irritée, sans savoir pourquoi, de la beauté et de l’air passionné de Julien.

— Un peintre ? dit madame des Morges tout étourdie ; ah ! ma chère, c’était donc vrai ?

— Oui, mes amis, c’était vrai, répondit hardiment Julie ; nous nous aimions avant de savoir que M. Antoine nous arracherait à la pauvreté qui nous menaçait l’un et l’autre.

— Je déclare que M. Antoine est un grand homme et un véritable philosophe ! s’écria l’abbé de Nivières. Si l’on se mettait à table !

— Allons dîner, mesdames et messieurs, répondit M. Antoine en offrant sa main à Julie. C’est une mésalliance, vous direz ; mais trois millions pour chacun de mes neveux, ça décrasse une famille, et mes petits-neveux auront le moyen d’acheter des titres.

Ce dernier argument changea en félicitations, un peu hésitantes, le blâme des amis de Julie. Elle dut se