Page:Sand - Cadio.djvu/149

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plus des hommes, ce sont des spectres. Je suis à bout de courage et de volonté, moi, pour les menacer, les injurier et les battre. Je ne sais ni mentir ni prêcher, M. Sapience lui-même y perd son latin : mais je sais me faire tuer, je ne sais que ça ! allons avec Saint-Gueltas tenter le dernier effort.

STOCK. Allons !

MACHEBALLE. Attendez, attendez ! Voilà des nouvelles ! (À Tirefeuille, qui arrive en se traînant.) C’est toi, mon garçon ? Qu’est-ce qui est arrivé là-bas ?

TIREFEUILLE. Rien ! une fausse peur. Un bleu, un seul, qui portait un ordre ou faisait une reconnaissance, je ne sais pas ! Je crois que c’est un officier. On a tiré sur lui, son cheval est tombé. On a sauté sur l’homme, on l’a bouclé, on te l’amène. Nos gars ont coupé à travers champs, ils vont sur la ville.

MACHEBALLE. C’est bon, ça ; mais les canons, comment qu’ils passeront les haies ?

TIREFEUILLE. Ah bah ! pour deux méchants canons !…

MACHEBALLE. Deux ? et les autres ?

TIREFEUILLE. On les a laissés en route. Jeannette s’est embourbée jusqu’à la gueule.

MACHEBALLE. Jeannette ? notre grand canon du bon Dieu, notre relique, le porte-bonheur de l’armée ? Pas possible ! tout est perdu, si on sait ça dans les rangs ! Messieurs, sauvez les canons, sauvez Jeannette ! c’est le plus pressé.

RABOISSON. Au fait, si les bleus nous suivent, eux qui n’ont peut-être pas d’artillerie… Venez, Stock, sauvons Jeannette ! (Ils partent.)

MACHEBALLE, à Tirefeuille. Eh bien, ce prisonnier, où ce qu’il est ?