Page:Sand - Cadio.djvu/163

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LE COMTE. Henri !… tu as fait ton devoir ; moi, j’ai cru faire le mien. J’ai hâté l’agonie de mon parti… Je le savais ; on réclamait mon sang… je l’ai donné. La France ne veut plus de nous. Que sera l’avenir ? Henri, où est ma fille ?

HENRI. Sauvée… avec Saint-Gueltas.

LE COMTE. Sois généreux, elle l’aime.

HENRI. Je le sais.

LE COMTE. Moi, je crains… Saint-Gueltas est… c’est un héros… oui, mais… — avant qu’ils passent en Angleterre — dis-leur… Mais tu ne les verras pas…

HENRI. Si je les voyais, que leur dirais-je ?

LE COMTE. Je veux… Non, je ne sais plus… Je ne sais rien… rien… Tout s’efface… Dieu m’appelle. Tout est perdu !… perdu… Vive le roi ! (Il expire. Coups de fusil très-près.)

UN FACTIONNAIRE, sur la butte. Un engagement par là !

LE COLONEL. À cheval ! à cheval ! Henri, courage ! à ton poste !

HENRI, à Cadio, tout en montant à cheval. Garde ce pauvre corps. Je viendrai le chercher. (Tous partent, excepté Cadio.)




Scène XIV. — CADIO occupé du cadavre ; puis LOUISE.


CADIO. Pauvre mort ! Je t’ai vu debout et fier, et fâché contre moi, dans ton château, et, à présent… c’est ma faute si tu es là couché… Ah ! la quenouille ! Je ne savais pas, moi ! Je vais le couvrir de feuilles sèches, je n’ai pas d’autre linceul à lui donner. (Au moment de lui couvrir le visage, il le regarde.) Il est beau tout de même, ce vieux homme, avec son sang dans ses cheveux blancs et son