ROXANE. Oui, moi ! moi qui vous parle, je sens bouillir dans mes veines le sang de ma race !
LE COMTE. Pauvre Roxane ! Gardez un peu de cette vaillance pour les événements qui menacent, car je crains bien qu’au premier coup de fusil…
ROXANE. Vous ne me connaissez pas ! je suis capable… (À Marie, lui mettant familièrement les mains sur les épaules.) N’est-ce pas, Marie ? dites ; mais j’oublie toujours que vous ne pensez pas comme nous !
MARIE. Oubliez-le, si cela vous fâche ; je ne vous le rappellerai jamais !
LOUISE. On sait cela, bonne Marie ! mais, au fond… (bas) tu approuves mon père ?
MARIE, aussi à voix basse. Ce qu’il dit est si noble, ce qu’il pense si respectable !… (Louise rêve.)
MÉZIÈRES, entrant. Une lettre pour M. le comte.
LOUISE. D’Henri peut-être ! Oui ! (Donnant la lettre au comte.) Lisez vite, mon père !
MÉZIÈRES. Je voyais bien ça… au timbre !… Puis-je rester pour savoir… ? (Louise fait un signe affirmatif.)
ROXANE, au comte. Il arrive, n’est-ce pas ? Dites donc !
LE COMTE, qui parcourt des yeux. Il va bien, il va bien !…
MÉZIÈRES, sortant. Dieu soit béni ! Ce cher enfant ! il va bien ! (Il sort.)
ROXANE, au comte. Mais vous avez l’air étonné ?
LE COMTE, donnant la lettre à Louise. Oui. Il ne paraît pas avoir reçu nos lettres. Elles ont du être saisies.
ROXANE. Ou la prudence l’empêche de répondre clairement. Voyons ! il faut deviner…
LE COMTE, à Louise. Il se montre enivré de joie d’avoir battu…
ROXANE. Battu !… Qu’est-ce qu’il a donc battu ?…
LOUISE. Les Prussiens.