Page:Sand - Cadio.djvu/229

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bateau avec elle et de venir rejoindre ma nièce, qui ne pouvait pas rester convenablement seule avec vous.

SAINT-GUELTAS. La Korigane ! Et d’où diable sort-elle ?

ROXANE. N’est-ce pas vous qui me l’avez envoyée ?

SAINT-GUELTAS. Non ! N’importe ! Allez rejoindre Louise. Elle est là, nous allons repartir. (Il lui montre la hutte.)

ROXANE. Ah ! marquis, nous vous devrons tout !

SAINT-GUELTAS. Allez, allez ! (Il fait quelques pas sur le rivage et se trouve auprès de la Korigane, qui attache son batelet.) Quel diable à triple queue t’amène ici avec la vieille folle ?

LA KORIGANE. Maître, je t’ai suivi partout sans me montrer. Je savais bien que tu allais chercher la jeune fille. Je t’ai amené la tante pour te contrarier. C’est bien clair comme ça, et je ne vois pas de quoi tu t’étonnes.

SAINT-GUELTAS. Ah ! oui-da ! Qui donc vous a conduites ici ? Est-ce Cadio ?

LA KORIGANE. Cadio ? Tirefeuille l’a tué, le pauvre Cadio ; il vient de me le dire. Et c’est toi qui as commandé cela ! Moi, j’ai volé un batelet, j’ai ramé, et me voilà… à moitié morte, par exemple ! Achève-moi, si tu veux. Je n’aurais pas la force de me sauver. (Elle se jette sur le sable.)

SAINT-GUELTAS, pensif, la regardant. Si petite, si frêle, si laide ! une espèce de singe !… et si forte, si résolue, si passionnée ! Tuer cela… oui, on écraserait d’un coup de talon cette tête plate comme celle d’une vipère ! (Il la pousse du pied.) Lève-toi, allons ! Ne tente pas ma fureur ! Vas-tu dormir là, baignée de sueur et à moitié couchée dans l’eau froide ?